Lady.K, boulevard de Ménilmontant, à Paris, le 19 juillet. THOMAS VON WITTICH Sur un mur du boulevard de Ménilmontant, une dizaine de le...

Sur un mur du boulevard de Ménilmontant, une dizaine de lettres noires peintes sur des feuilles blanches A4 ont été, pour la plupart, arrachées, constituant un message illisible. En cette fin de journée de juillet, cette artère du nord-est de Paris est bondée, mais cela n’arrête pas Lady.K. Coiffée d’un élégant chapeau bibi noir, sac Louis Vuitton sur l’épaule, bouquet de roses à la main, elle s’avance vers le mur pour restaurer à coup de bombe de peinture bleu le slogan « Elle dit non. Il la tue ».
Un passant, qui n’a rien perdu de la scène, y va de son commentaire. « Les femmes aussi peuvent être cinglées. Y a pas que les mecs ! », persifle-t-il, avant de disparaître. « Réaction classique », se désole Lady.K. 72 % des victimes de violences conjugales sont des femmes – chiffres Interstats, enquête cadre de vie et sécurité 2019.
Une prouesse dans ce milieu masculin
Omniprésents dans les rues des grandes villes de France depuis un an, les messages anti-féminicides sont nombreux à avoir été effacés ou arrachés. Si certaines mairies, notamment celle du 20e arrondissement de Paris, tolèrent ces affichages sauvages, d’autres les effacent au Kärcher. « Les arrachages sont le fait d’hommes qui ne sont pas contents qu’on envahisse les rues avec de messages féministes, affirme Marguerite Stern, fondatrice du mouvement « Collages féminicides ». Les réparer comme le fait Lady.K, c’est non seulement un acte hyper beau, mais c’est aussi une façon de ne pas se laisser anéantir par la volonté des hommes que la rue reste un espace masculin ».
Bien qu’elle ait placardé les noms de féministes telle Marie-France Hirigoyen et de victimes comme Marie Trintignant, Lady.K ne se voit pas comme une « colleuse », mais une « réparatrice ». Avec ses 100 000 abonnés sur Instagram, elle n’en est pas moins une recrue de choix pour un mouvement qui fonctionne beaucoup grâce aux réseaux sociaux.
Aucune personnalité du graffiti français n’est ainsi suivie. Une prouesse dans ce milieu très masculin. Ce succès, la graffeuse l’a bâti en postant chaque jour depuis trois ans des vidéos de ses actions les plus spectaculaires : on la voit ainsi, vêtue d’une robe de mariée, taguer ostensiblement la vitrine d’un magasin de mode des Champs-Elysées devant les passants ; sur une autre, en mini short, perchée sur d’immenses talons, remplir avec une bombe de peinture les lettres d’un graff en cyrillique sur le flanc d’un train. « J’aime provoquer, confie-t-elle. A 15 ans, j’avais le crâne rasé. On me demandait si j’avais le cancer ou si j’étais une skinhead. Je m’en fichais. J’ai toujours été comme ça, très exubérante ».
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